Sommeil, insomnie et psychopathologie

  • MORIN, CHARLES M.
  • BÉLANGER, LYNDA
  • FORTIER-BROCHU, ÉMILIE
Canadian Psychology 47(4):p 245-262, November 2006. | DOI: 10.1037/cp2006016

Le sommeil joue un rôle primordial dans l'adaptation psychologique de l'individu. Il n'est donc pas étonnant que les perturbations du sommeil soient très courantes, tant chez les personnes avec des difficultés psychologiques situationnelles que chez celles souffrant d'une psychopathologie plus chronique. Cet article examine la relation entre le sommeil, l'insomnie et la psychopathologie. Dans un premier volet, des estimations de la prévalence des difficultés de sommeil dans la population générale et parmi les groupes de patients souffrant de psychopathologies sont présentées. Les données suggèrent un taux élevé de comorbidité, particulièrement entre l'insomnie, la dépression et l'anxiété. Les études longitudinales indiquent que l'insomnie est non seulement un symptôme mais représente également un facteur de risque important de ces troubles. Le deuxième volet présente les principales plaintes subjectives et anomalies physiologiques du sommeil associées à certains troubles anxieux, de l'humeur et à la schizophrénie. Les difficultés à initier et à maintenir le sommeil représentent un symptôme commun et même un critère diagnostique de plusieurs de ces troubles, notamment la dépression majeure et le trouble d'anxiété généralisée. Enfin, les effets du traitement de l'insomnie ou de la psychopathologie sur les symptômes et les conditions comorbides sont passés en revue. Ces résultats montrent que le traitement de la dépression majeure ou de l'anxiété généralisée produit des effets bénéfiques sur le sommeil mais des difficultés résiduelles persistent souvent et peuvent même accentuer les risques de rechutes. Il semble donc essentiel de cibler directement les difficultés de sommeil pour optimiser la généralisation des effets thérapeutiques et prévenir la rechute. En conclusion, nous mettons en évidence les principales implications pour la pratique clinique et suggérons quelques lignes directrices pour les recherches futures.

Sleep plays a critical role in psychological well-being and adaptation. Not surprisingly, sleep disturbance is a frequent problem among individuals facing situational psychological difficulties as well as among those with more chronic psychopathology. This article examines the relationship among sleep, insomnia, and psychopathology. In the first section, we address the issue of comorbidity by examining prevalence rates of sleep disturbances in the general population and among subgroups of individuals with selected psychopathologies and, conversely, rates of psychological symptoms/syndromes among individuals with and without sleep disturbances. The data indicate high rates of psychological syndromes (40%) associated with insomnia among community-based samples, and even higher rates (80%) of sleep disturbances among selected samples of patients with psychopathology. Comorbidity is particularly high among patients with insomnia, major depression, and generalized anxiety disorder. Although insomnia is often a symptom of an underlying psychopathology, longitudinal studies show that it can also be an important risk factor for a new onset major depressive disorder. The second section of this article summarizes the main subjective and EEG sleep impairments in selected anxiety disorders, mood disorders, and schizophrenia. Insomnia is a common clinical feature or even a diagnostic criterion of several of those disorders. Other related symptoms such as fatigue, low energy and poor concentration are shared across insomnia, major depression, and generalized anxiety disorder, suggesting some common mechanisms among those conditions. In addition to subjective sleep complaints, there is also evidence of EEG sleep abnormalities, such as impairment of sleep continuity, reduced slow wave sleep, and altered REM sleep patterns, with the latter two features being more specific to mood disorders. The third section of this article examines the effects of insomnia treatment on co-existing psychological symptoms or disorders and, conversely, the effects of treatment of selected anxiety and mood disorders on sleep. These results indicate that treatments of depression and anxiety may produce some sleep improvements but, in many cases, residual sleep disturbances persist and may actually increase the risk of subsequent relapse. The main implication is that treatment should directly target both co-existing conditions. Additional implications for the treatment and prevention of comorbid sleep disturbances and psychopathology and for future research are discussed.

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